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Entre ambition et réalité, que réserve la loi portant création de l’Agence Nationale de Rénovation Urbaine et de réhabilitation des constructions menaçant ruine?

Entre ambition et réalité, que réserve la loi portant création de l’Agence Nationale de Rénovation Urbaine et de réhabilitation des constructions menaçant ruine?

Par la promulgation de la loi n°12-94 portant sur les constructions menaçant ruine et l’organisation des opérations du renouvellement urbain, les pouvoirs publics ambitionnent de mettre sur les rails des mesures capables à même d’apporter des solutions aux constructions menaçant ruine, et de baliser le champ d’intervention en termes de gouvernance et des modes opératoires.

Une lecture de ce nouveau dispositif juridique s’impose et dont les clés d’entrée rendent compte, d’abord, des dispositions réglementaires prévues par la loi, ensuite, de la problématique de l’intervention au niveau du menaçant ruine, et enfin, de l’intérêt de la création d’un outil institutionnel pour le renouvellement urbain et la mise à niveau du menaçant ruine (ANRU-MR).

D’emblée, convient-il de préciser que le menaçant ruine concerne les tissus urbains notamment les logements historiques dans les médinas, les habitations délabrées et les équipements dans un état dégradé.

Dans son corpus, la loi définit le bâtiment menaçant ruine, comme étant « tout bâtiment ou construction dont son effondrement total ou partiel peut constituer un danger à la sécurité de ses propriétaires, ses exploitants ou les passagers et aux constructions limitrophes ».

Les nouveautés de la loi s’arrêtent sur la responsabilité des propriétaires, en premier lieu, dans la rénovation de leurs bâtiments, et dans un second lieu aux exploitants desdits bâtiments qu’ils soient publics ou privés. Et en cas de location des bâtiments, leur démolition peut être ordonnée par décision du président du conseil communal.

L’intervention sur les constructions menaçant ruine, une équation à plusieurs degrés:

Il importe de préciser que selon les statistiques du Ministère de l’habitat, le menaçant ruine représente quelques 43000 habitations et près de 140000 familles sont concernées, soit plus de 500 000 habitants concernés.

Il est entendu que l’intervention sur l’habitat menaçant ruine est à la merci d’énormes défis. Ces derniers sont d’ordres socio-économiques, juridico-fonciers, patrimoniaux et financiers.

S’agissant des aspects socio-économiques, il est connu que les secteurs urbains menaçant ruine représentent des lieux de concentration de la population à faible revenu avec une densité qui dépasse de loin celle enregistrée dans les autres pans de la ville. Quant aux dysfonctionnements urbains, ils renseignent sur un cadre bâti qui a perdu au fil des ans de son éclat urbain, et fait face à un déficit d’équipement et de structures d’accueil.

Autre défi majeur renseigne sur le fait que l’essentiel du menaçant ruine se trouve dans les médinas, et ce qui rend l’intervention encore très délicate vu le potentiel patrimonial que regorgent ces tissus historiques. Aussi, est-il important de souligner la nécessité de disposer de réserve foncière pour mener dans les meilleures conditions des opérations de renouvellement urbain.

S’agissant de la question du financement des opérations de réhabilitation ou de renouvellement urbain, elle a été reportée sin die tant que des passerelles ne soient pas ouvertes avec le Fonds de Solidarité de l’Habitat et d’Intégration Urbaine (FSHIU).

L’ANRU, une nième mesure de l’ «Agencification » de l’Etat:

Prévue par la loi et dotée des prérogatives de la puissance publique, l’Agence dispose de mécanismes juridiques notamment le droit d’expropriation pour utilité publique, le droit de priorité, et le droit de constituer une réserve foncière, et ce afin de permettre à cet établissement public de mener à bon port ses projets de renouvellement urbain et de mise à niveau des bâtiments menaçant ruine.

Par ailleurs, l’Agence est investie de missions d’élaboration d’études, mise en place de stratégies et programmes urbains et projets relatifs à la rénovation urbaine et à la réhabilitation des tissus et des bâtiments menaçant ruine.

Au-delà des bonnes intentions du législateur, des défis de taille se dressent sur le chemin de cette première expérience de mise en place de l’ANRU-MR.

  • Une déficience dans la convergence des financements de la politique de la ville en général, et dont le menaçant ruine est une composante parmi d’autres. On ne peut rappeler dans ce sens les résultats mitigés d’une décennie (2004-2014) de la politique de la mise à niveau urbaine ;
  • Une politique de la ville, qui nonobstant les espoirs nourris par les politiques et les professionnels lors de la co-construction du référentiel en juin 2012, elle peine à être palpable dans le management urbain de nos villes;
  • Un déficit patent au niveau du traitement de la question du menaçant ruine. Quant on sait que seulement 4086 bâtisses ont été traitées sur plus de 17000 programmées durant la mandature actuelle ;
  • N’aurait-il pas été opportun d’unifier les instruments d’intervention sur la ville pour un contrat d’intervention globale qui traitera les questions de la mise à niveau urbaine, du renouvellement urbain, le menaçant ruine -quant il existe- et tous ce qui versent dans l’amélioration des milieux de vie ;
  • Qu’en est-il de l’option d’un transfert de compétence à la région, pour d’une part, la consécration de ce choix irréversible de gouvernance, et d’autre part mettre les collectivités territoriales devant leurs responsabilités vis-à-vis de la question du menaçant ruine ;
  • Qu’adviendra-t-il des programmes de traitement du menaçant ruine portés par le Groupe Al Omrane ?.

Telles sont les questions auxquelles l’actuel gouvernement aurait pu y apporter des réponses, au lieu de les esquiver en créant une structure qui va à contre sens de la consécration des nouvelles échelles de décision telles qu’elles sont portées par la régionalisation avancée.

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